Le Bénin vient de franchir une étape majeure dans sa politique de réconciliation avec son passé en promulguant une loi offrant la possibilité aux descendants d’Africains déportés lors de la traite négrière d’acquérir la nationalité béninoise.
Ce texte de loi, signé par le président Patrice Talon, vise à reconnecter ces millions d’Afro-descendants à leurs racines africaines. Il constitue un geste symbolique fort, renforçant l’engagement du pays à assumer son passé historique tout en soutenant la reconstruction d’une identité perdue.
Une initiative pour panser les blessures de l’Histoire
La loi concerne spécifiquement les descendants d’esclaves africains, déportés dans le cadre du commerce triangulaire, dont un parent est né avant 1944.
Selon Kakpo Mahougnon, député de la mouvance présidentielle et spécialiste des études africaines, cette démarche vise avant tout à combler un vide psychologique et culturel.
« Ces Afro-descendants ont été brutalement coupés de leur source culturelle. Il est normal et nécessaire qu’ils retrouvent un lien direct avec cette culture », explique-t-il.
Loin d’être une simple manœuvre politique ou une stratégie touristique, cette loi répond à un besoin profond de réconciliation identitaire pour des millions de personnes issues de la diaspora africaine. « Lorsqu’ils vont se sentir revenir chez eux, il y aura une sorte de magie qui fonctionne au niveau de l’être », ajoute le député.
La loi ambitionne ainsi de renforcer un sentiment d’appartenance et de dignité pour ces personnes, en leur offrant un cadre juridique leur permettant de revendiquer officiellement leur héritage africain.
Un retour symbolique, mais pas sans défis
Bien que la mesure n’ait pas pour objectif immédiat de servir des intérêts économiques ou politiques, elle pourrait potentiellement stimuler le tourisme mémoriel, un axe clé du programme du président Patrice Talon.
Les villes comme Ouidah, autrefois des centres de la traite des esclaves, pourraient attirer un nombre croissant de visiteurs désireux de renouer avec leurs racines.
Cependant, obtenir la nationalité béninoise par cette voie ne garantit pas l’accès aux droits civiques complets. Les nouveaux citoyens ne pourront ni voter ni travailler dans la fonction publique, du moins dans un premier temps.
Cette restriction est une étape transitoire, selon Kakpo Mahougnon, qui assure que ces nouveaux citoyens pourront, avec le temps, acquérir la pleine nationalité.
Un engouement croissant
L’initiative a suscité un engouement notable auprès des Afro-descendants concernés. « Nous avons échangé avec plusieurs d’entre eux avant même le vote de la loi, et ils ont montré un grand enthousiasme », confie Kakpo Mahougnon.
Ce retour positif témoigne de l’importance de cette mesure pour les descendants d’esclaves, souvent en quête d’un ancrage identitaire.
Bien que le nombre de demandes soit encore incertain, cette nouvelle législation marque une étape importante dans le processus de réconciliation historique entre le Bénin et sa diaspora.
Pour le pays, il ne s’agit pas seulement de reconnaître un lien historique, mais de réaffirmer l’importance des racines culturelles dans la construction de l’identité individuelle et collective.
La loi sur la naturalisation des descendants d’esclaves au Bénin ouvre une nouvelle ère dans les relations entre le pays et sa diaspora.
En offrant une reconnaissance officielle à ceux qui ont été brutalement séparés de leurs terres ancestrales, elle permet de refermer, en partie, une blessure historique profonde.
Le chemin est encore long, notamment pour garantir une pleine égalité des droits, mais cette initiative constitue un pas décisif vers la réparation et la réconciliation culturelle.
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