Le Niger est en proie à des tensions croissantes alors que Rhissa Ag Boula, ancien ministre et figure influente des rébellions touarègues, s’oppose frontalement au régime militaire d’Abdourahamane Tiani. Déchu de sa nationalité nigérienne le 10 octobre dernier, Ag Boula persiste dans sa détermination à contester le pouvoir de la junte, qu’il accuse de mener le pays vers l’impasse.
Depuis la France, où il a obtenu l’asile en août 2023, l’ancien ministre de Mohamed Bazoum a créé les Forces armées libres (FAL), une organisation qui aspire à renverser le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), au pouvoir depuis le coup d’État de juillet 2023. Ses ambitions vont au-delà d’une simple résistance politique. Il vise à fédérer les opposants en exil et envisage la formation d’un front armé contre la junte.
Une attaque marquée par l’ambiguïté
Le 19 octobre 2024, les FAL ont revendiqué leur première attaque militaire contre des positions de l’armée nigérienne à Assamaka, dans la région d’Agadez. L’offensive a causé la mort de sept soldats, mais elle a également été revendiquée par les jihadistes affiliés au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM), ajoutant de la confusion à la situation sécuritaire déjà complexe dans la région.
Rhissa Ag Boula, conscient des doutes qui entourent son organisation, insiste que la résistance doit être une priorité pour tous les Nigériens. Il a noué des alliances avec d’autres groupes armés, notamment le Front patriotique de libération (FPL), majoritairement composé de combattants toubous. Ensemble, ils forment la Coordination des forces armées libres du Niger (CFALN), un front qui cherche à perturber le pouvoir de Tiani et ses alliés.
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Un acteur historique des rébellions touarègues
Ag Boula n’est pas un nouveau venu dans le paysage politique et militaire nigérien. Né en 1957, il a été l’un des principaux leaders des rébellions touarègues des années 1990. Après avoir participé aux accords de paix de 1995, il a occupé plusieurs postes ministériels, dont celui de ministre du Tourisme et de l’Artisanat pendant sept ans. Ses relations avec Niamey ont toutefois connu des hauts et des bas. Accusé de meurtre en 2004, il avait quitté le pays pour s’exiler en France, avant de revenir après le coup d’État de 2010.
Abdourahamane Tiani : une riposte économique et stratégique
Le général Abdourahamane Tiani, quant à lui, s’appuie sur sa connaissance approfondie des dynamiques internes du Niger pour contrer les mouvements d’opposition. En abrogeant en novembre 2023 la loi criminalisant le trafic de migrants, il a cherché à regagner la confiance des communautés touarègues d’Agadez, un pilier stratégique dans la région. En jouant sur les cordons de la bourse, Tiani espère neutraliser toute tentative de soulèvement.
La confrontation entre Ag Boula et Tiani pose une question centrale : Rhissa Ag Boula peut-il encore mobiliser les communautés touarègues et toubous, alors qu’il ne bénéficie plus de l’appareil d’État qui autrefois consolidait son pouvoir ? Pour le moment, c’est Tiani qui semble contrôler les leviers économiques, mais l’évolution des alliances pourrait changer la donne dans les mois à venir.
La guerre ouverte entre ces deux figures risque de prolonger l’instabilité du pays, déjà frappé par l’insécurité et la crise politique depuis le renversement de Mohamed Bazoum.
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