lundi 3 mars 2025

L’Ukraine convoitée : la bataille des ressources entre Washington et Bruxelles

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Trois ans après l’invasion russe, l’Ukraine est au cœur d’une nouvelle bataille stratégique, non pas sur le front militaire, mais sur celui des ressources naturelles. Derrière le soutien occidental à Kyiv se cache un enjeu économique majeur : l’accès aux métaux rares et aux matières premières critiques du sous-sol ukrainien. Si l’Union européenne s’est engagée dès 2021 à tisser un partenariat avec Kyiv dans ce domaine, Washington conditionne désormais son soutien militaire à un accès privilégié aux mêmes ressources.

Un bras de fer entre Kyiv et Washington sur les ressources minières

Lors de sa récente visite à Washington, Volodymyr Zelensky a trouvé face à lui un Donald Trump intraitable. Le 47ᵉ président américain, revenu au pouvoir avec une vision transactionnelle des relations internationales, a clairement lié l’aide américaine à un contrôle accru des ressources ukrainiennes par les entreprises américaines.

Un accord sur les terres rares, amorcé sous la présidence Trump en 2020, semble désormais remis en cause après une rencontre tendue entre les deux dirigeants. Pourtant, l’ancien magnat de l’immobilier ne cache pas son intérêt pour les richesses minières ukrainiennes : « Nous allons creuser, creuser, creuser », a-t-il déclaré avant l’entretien avec Zelensky.

Un document ayant fuité dans la presse évoque la création d’un fonds d’investissement pour la reconstruction de l’Ukraine, qui donnerait aux investisseurs américains un accès privilégié aux gisements de métaux, de pétrole, de gaz et aux infrastructures stratégiques du pays. Cependant, aucune mention n’a été faite des garanties de sécurité que réclame Zelensky pour sceller cet accord, ce qui complique les négociations.

Si Trump a laissé la porte ouverte à un nouvel échange, il a clairement indiqué que le président ukrainien devra revoir sa position : « Il pourra revenir quand il sera prêt à la paix. » Une déclaration qui souligne l’écart profond entre les visions des deux hommes sur l’avenir du conflit avec la Russie.

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L’Europe joue sa carte, mais avec prudence

Face à cette pression américaine, l’Union européenne rappelle qu’elle a déjà signé un accord stratégique avec Kyiv sur les matières premières critiques en 2021, bien avant le début de la guerre. Lors d’une conférence de presse le 26 février, Stéphane Séjourné, vice-président de la Commission européenne, a insisté sur le fait que cet accord demeure un cadre structurant pour la coopération entre Bruxelles et Kyiv.

L’UE a un intérêt majeur à sécuriser son approvisionnement en terres rares, graphite, lithium et autres ressources essentielles aux technologies de la transition énergétique. Des projets européens liés à cet accord devraient voir le jour dès mars, et certaines estimations suggèrent que le graphite ukrainien pourrait couvrir jusqu’à 10 % des besoins européens d’ici 2030.

Cependant, alors que Washington hausse le ton, Bruxelles semble hésitante. La Commission européenne n’a pas confirmé publiquement l’existence de discussions parallèles avec Kyiv pour renforcer son influence face aux pressions américaines. Un porte-parole s’est contenté de déclarer : « Il n’y a vraiment rien à ajouter pour le moment. »

Un enjeu géopolitique majeur pour Kyiv

Pour l’Ukraine, ces négociations sont cruciales. Le pays a besoin d’un soutien financier et militaire massif pour poursuivre la guerre contre la Russie, mais il doit aussi préserver sa souveraineté sur ses ressources stratégiques. Entre une Europe qui avance prudemment et un Trump qui conditionne l’aide américaine à des concessions économiques majeures, Kyiv est prise dans un dilemme périlleux.

Comme l’a souligné l’eurodéputé Thijs Reuten, « l’Ukraine comprend que sa relation avec l’Europe est un partenariat à long terme, qui n’est pas basé sur une politique de l’Europe d’abord. » Une critique implicite du chantage exercé par Washington, mais aussi un signal que Bruxelles pourrait jouer un rôle plus actif pour éviter que l’Ukraine ne devienne un simple champ de bataille économique entre grandes puissances.

Alors que la guerre contre la Russie se poursuit, la question des ressources ukrainiennes pourrait redessiner les alliances et tester la solidarité occidentale. Kyiv, qui lutte pour sa survie, devra naviguer avec habileté entre ces intérêts divergents pour préserver à la fois son indépendance et son avenir économique.

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