Le Gabon a franchi une étape cruciale le 16 novembre avec un référendum visant à adopter une nouvelle constitution, marquant un tournant vers la démocratie après la chute du régime de la famille Bongo. En août 2023, le président Ali Bongo Ondimba avait été destitué par l’armée après avoir remporté une élection controversée, mettant ainsi fin à 55 ans de règne familial dans cette nation riche en pétrole.
Une Constitution pour tourner la page de la dynastie Bongo
Environ 860 000 électeurs inscrits se sont rendus aux urnes pour se prononcer sur un projet de constitution qui propose des changements majeurs, notamment la limitation des mandats présidentiels à deux, d’une durée de sept ans chacun, et l’interdiction de la succession familiale à la tête de l’État. La constitution actuelle permet des mandats de cinq ans renouvelables indéfiniment, une disposition qui avait facilité la consolidation du pouvoir par la famille Bongo.
Un appui massif pour le projet constitutionnel
Selon le ministre de l’Intérieur, Hermann Immongault, la nouvelle constitution a été approuvée à plus de 91 % par les électeurs, avec un taux de participation de 53,5 %. Cette approbation massive montrerait l’aspiration des Gabonais à une gouvernance plus démocratique et la fin de l’hégémonie d’une même famille. La Constitution doit encore être confirmée par la Cour constitutionnelle, mais les résultats préliminaires témoignent d’un soutien populaire fort.
Une transition sous la supervision militaire
À la tête du gouvernement de transition, le général Brice Oligui Nguema, ancien chef de la Garde républicaine et cousin de l’ancien président, a joué un rôle déterminant dans le processus. Depuis le coup d’État d’août 2023, Nguema s’est engagé à préparer une transition vers un régime civil, avec des élections présidentielles, législatives et locales prévues pour août 2025. Cependant, bien que les dirigeants de la transition soient censés être inéligibles à la présidence, une exception a été faite pour Nguema, laissant planer des doutes sur la possibilité d’une prise de pouvoir prolongée par les militaires.
Dans un contexte d’incertitude, certains observateurs et membres de la société civile craignent que la nouvelle constitution puisse accorder trop de pouvoir au président. En supprimant le poste de Premier ministre et en autorisant le président à dissoudre l’Assemblée nationale une fois par mandat, la réforme pourrait concentrer davantage de pouvoir entre les mains du chef de l’État.
Des critiques et inquiétudes quant à un potentiel maintien au pouvoir des militaires
Si le gouvernement militaire présente la nouvelle constitution comme un engagement vers la démocratie, des voix critiques expriment des réserves. Plusieurs observateurs de la société civile gabonaise, estime que cette constitution pourrait être « taillée sur mesure pour un homme fort » et favoriser la perpétuation d’un régime militaire déguisé en démocratie.
Des critiques portent également la suppression du poste de Premier ministre et la concentration du pouvoir exécutif, la durée de mandat de sept ans, bien que limitée à deux termes, reste longue par rapport aux normes démocratiques internationales.
Un pas vers la démocratie, mais des défis demeurent
Malgré ces inquiétudes, l’adoption de cette nouvelle constitution reste un tournant important pour le Gabon. Les autorités gabonaises et les observateurs internationaux ont salué le bon déroulement du vote. Des représentants de l’Union africaine et de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale ont confirmé que le référendum s’était déroulé dans le calme et en toute transparence.
Le référendum marque le début d’une feuille de route ambitieuse pour réformer les lois électorales, créer une nouvelle commission électorale et organiser des élections pour permettre un retour au pouvoir civil d’ici 2025. Il reste toutefois à voir si le général Nguema respectera cet engagement et si la nouvelle constitution pourra garantir une démocratie durable.
Ainsi, ce référendum place le Gabon à un carrefour de son histoire politique, où les attentes de changement se heurtent aux réalités d’une transition militaire et aux défis institutionnels.
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