Le Kenya traverse une période inédite de son histoire politique avec la destitution, le jeudi 17 octobre 2024, de Rigathi Gachagua, vice-président du pays. Ce dernier a été reconnu coupable de cinq chefs d’accusation sur les onze qui pesaient contre lui.
Cette décision, prise tard dans la nuit par le Sénat kényan, marque la fin de plusieurs mois de tensions entre le président William Ruto et son adjoint, et ouvre une nouvelle page d’incertitude pour le pays, souvent vu comme une démocratie stable dans une région instable de l’Afrique de l’Est.
Accusé notamment de corruption, d’abus de pouvoir et d’acquisitions frauduleuses, Rigathi Gachagua devient le premier vice-président du Kenya à être écarté du pouvoir dans le cadre d’une procédure de destitution, telle que prévue par la Constitution de 2010.
Le Sénat n’a eu besoin que de prouver un seul des chefs d’accusation pour le démettre de ses fonctions. Ce processus met en lumière les profondes divisions au sommet de l’État et pose des questions sur l’avenir politique du pays.
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Un processus controversé et des accusations de complot
Rigathi Gachagua, âgé de 59 ans, a nié en bloc les accusations portées contre lui, les qualifiant de « pure propagande » et de « complot politique » visant à le chasser du pouvoir.
Il faisait face à des allégations de détournement de fonds publics, de trafic d’influence, et d’acquisition illégale de biens immobiliers. Les audiences ont pris une tournure particulière lorsqu’il ne s’est pas présenté après la pause déjeuner, prétendument en raison d’une hospitalisation pour des douleurs thoraciques.
Malgré une demande de report du vote par ses avocats, le Sénat a poursuivi la procédure et voté sa destitution.
Les défenseurs du vice-président ont dénoncé cette décision, soulignant l’absence de l’accusé lors du vote final, et ont exprimé leurs réserves quant à la précipitation de la chambre haute.
Pour Karungo Thangwaune, sénateur et partisan de Gachagua, « C’est un jour triste pour notre pays », déplorant la manière dont la procédure s’est déroulée.
Des relations tendues entre Ruto et Gachagua
L’élection de Rigathi Gachagua au poste de vice-président en 2022 avait pourtant été décisive pour la victoire de William Ruto face à son rival Raila Odinga. Grâce à son influence considérable dans la région stratégique du Mont Kenya, Gachagua avait su mobiliser un soutien crucial pour le président.
Toutefois, les relations entre les deux hommes se sont rapidement dégradées, notamment à la suite des manifestations antigouvernementales qui ont secoué le pays en juin et juillet 2024.
Ces protestations, violemment réprimées et ayant causé au moins 60 morts, avaient mis en lumière les divisions internes au sein de l’exécutif. Le vice-président était accusé par ses détracteurs de ne pas avoir suffisamment soutenu le président Ruto face à cette crise.
Cette destitution reflète les tensions politiques persistantes au sommet de l’État et alimente les critiques concernant la déconnexion entre les dirigeants et la population kényane. Alors que le pays sort difficilement de cette crise politique, l’avenir immédiat reste incertain.
Vers une nouvelle ère pour le Kenya ?
Le président William Ruto dispose désormais de 14 jours pour nommer un nouveau vice-président, qui devra ensuite recevoir l’approbation du Parlement.
Ce processus sera décisif pour déterminer la direction future du pays et pourrait être un test de la stabilité démocratique du Kenya, dans un contexte où les fractures politiques sont de plus en plus visibles.
Le départ de Rigathi Gachagua laisse également un vide dans la région stratégique du Mont Kenya, dont l’influence politique est cruciale pour tout dirigeant kényan.
Alors que les regards sont désormais tournés vers le choix du nouveau vice-président, le Kenya entre dans une période charnière où les équilibres politiques pourraient être redéfinis.
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