vendredi 20 septembre 2024

Normalisation des relations franco-centrafricaines, quand la vérité rattrape la propagande russe.

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A la cérémonie du 14 juillet à Bangui, l’Ambassadeur de France, Bruno Foucher a informé les autorités centrafricaines en présence du Président de la République Centrafricaine, Faustin Archange Touadera que Paris a décidé « la reprise imminente de l’aide budgétaire française, d’un montant de 10 millions d’euros » qui lui sera versée en deux tranches. « Cinq millions d’euros seront débloqués immédiatement ». Ce soutien français sera élargi aux secteurs de la sécurité, la justice, l’éducation et la santé profiteront aussi de cette assistance.

Cette reprise d’aide après trois ans de rupture marque un nouveau chapitre des relations entre les deux pays qui s’étaient fortement dégradée depuis le déploiement des paramilitaires russes du groupe Wagner et l’activisme de Moscou. Paris avait donc décidé de suspendre en 2021 son assistance financière et sa coopération militaire avec son ancienne colonie qu’il accusait d’être « complice » de la campagne anti-française orchestrée par la Russie pour nuire à ses intérêts et influence dans le pays.

Présence de Touadera à la commémoration du 14 juillet à Bangui pour acter la normalisation

Mais depuis la suspension de cette enveloppe qui soulageait l’économie centrafricaine suffocante, certaines institutions financières ont aussi durcit les conditions d’octroi de prêt au pays par manque de « transparence budgétaire ». Interrogé par la presse sur les critères de validation des appuis budgétaires, Han Fraeters, le représentant de la Banque Mondiale à Bangui avait déclaré, que  « le problème est sur cette visibilité dans les dépenses de l’État. Dans le secteur de la sécurité, il y a des dépenses qu’on ne retrouve pas dans le budget. Et c’est là vraiment où l’on a posé des questions au gouvernement et l’on attend la réponse du gouvernement ».  Pour des proches du camp présidentiel, « force est de constater que des critères géopolitiques, géostratégiques sont pris en compte dans le traitement du dossier de la RCA ». Nul n’ignore qu’une partie des recettes de l’Etat servent à payer les services de Wagner pour protéger le Président et appuyer l’Armée.

Face à l’absence de financement extérieur pour soutenir les dépenses souveraines alors que le budget national n’avoisine que les 316 milliards Franc CFA, le Gouvernement « exténué » ne peut exécuter des projets. « Devant ces difficultés économiques que traverse la Centrafrique, le Gouvernement est donc contraint de se retourner vers la France », ont souligné des observateurs politiques centrafricains. Le retour de l’enfant prodigue ?

Cette normalisation a été marquée par la présence du Président centrafricain, F.A Touadera à la cérémonie du 14 juillet à la résidence de l’Ambassadeur de France à Bangui. Contrairement aux années précédentes où le Chef de l’Etat était représenté par un membre du Gouvernement.

Quand la réalité rattrape la propagande

Déployés dans le pays en 2018 d’abord comme « instructeurs » suite à l’exemption de l’embargo de l’ONU qui autorisait la Russie à livrer aux Forces Armées Centrafricaines 1400 fusils d’assaut. Très vite, le Gouvernement a trouvé un allié pour contourner le blocus onusien qui le prive de moyen d’équiper l’armée pour lutter efficacement contre les groupes armés. Après la victoire sur la rébellion de la Convention des Patriotes pour le Changement (CPC) parvenues dans les faubourgs de Bangui, les mercenaires russes et l’armée nationale reprendront le contrôle de plusieurs localités en 2021. Un succès militaire acclamé par la grande majorité centrafricaine brimée par la rébellion et qui a permis à Touadera de briguer un deuxième mandat en 2021.

Profitant de cette position, la Russie va étendre sa toile pour contrôler le pouvoir et développer une véritable campagne de désinformation antifrançaise. Au-delà de la RCA, plusieurs activistes se réclamant « panafricains », comme N. Yamb, Kemi Seba, F. Nyamsi mouilleront aussi la barbe dans ce matraquage médiatique. Mais, certains vont vite se rebiffer suite à la modification de la Constitution par Touadera dans l’intention de briguer un troisième mandat.

Tout comme certains de ces activistes, des centrafricains déchanteront après les actes de tortures perpétrés par les russes sur de paisibles citoyens : les intimidations, le racketage, le viol de mineures, l’exploitation des bois et des mines d’or et de diamants jusqu’à la vente de bois de chauffe. Une prédation néocoloniale qui met à nu les ambitions russes alors que la France reçoit des critiques pour la Françafrique. L’opinion croyait que le nouveau partenaire adoptera une autre posture dans une relation gagnant-gagnant. Pire, aucune aide promise par Moscou n’a été versée à part les 50.000 tonnes de blé et le soutien à des activistes ainsi que des médias pour sa propagande anti-occidentale. Les centrafricains qui espéraient que Moscou déploiera des engins de génie civil pour la construction de route pour désenclaver le pays ont vite déchanté. Cette normalisation entre Paris et Bangui n’a pas manqué de déplaire à des « panafricains ». Dans un tweet, @EgountchiLdna a qualifié l’aide de la France à la RCA de « trahison » de la part du Président Touadera.

Aujourd’hui, l’Afrique est en danger et surtout l’Afrique de l’Ouest, dont le curseur idéologique vire dramatiquement et radicalement vers son niveau le plus bas. Les dérives et les joutes verbales fondées sur la théorie d’escalade sont devenues un mode de communication de certains acteurs politiques. Il est temps de mettre point à ce type de comportement. Ces joutes verbales et campagnes de diabolisation ne nourrit pas le peuple. Que l’exemple de la Centrafrique inspire d’autres Etats.

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