Le Bénin s’apprête à franchir une nouvelle étape dans la reconnaissance de son patrimoine culturel et historique. Une proposition de loi sur la chefferie traditionnelle a été affectée à la Commission des lois de l’Assemblée nationale ce lundi 10 mars 2025. Cette initiative vise à doter le pays d’un cadre juridique officiel pour encadrer et valoriser l’autorité des rois traditionnels, garants d’une part essentielle de l’identité nationale.
Un cadre légal pour 16 royaumes
Si la loi est adoptée, seize royaumes seront officiellement reconnus comme chefferies traditionnelles au Bénin : Allada, Bassila, Bouè, Danhomè, Dogbo-Ahomey, Hogbonou, Igbo Idaatcha (Dassa), Sakété, Kétou, Kika, Kilir (Djougou), Kpanné (Kouandé), Nikki, Sandiro, Savalou et Savè. Chaque royaume sera dirigé par un roi, qui incarnera la continuité des traditions et des valeurs culturelles propres à sa communauté.
Cette reconnaissance légale répond à un double objectif : d’une part, assurer une meilleure préservation du patrimoine culturel et, d’autre part, clarifier le rôle des rois traditionnels dans la société contemporaine. En effet, la chefferie traditionnelle, bien que profondément ancrée dans l’histoire du pays, a souvent évolué en marge des institutions républicaines sans véritable cadre juridique.
Un rôle renforcé pour les rois traditionnels
La Commission des lois devra se pencher sur plusieurs aspects cruciaux, notamment les modalités de désignation des rois, leurs prérogatives et leur interaction avec l’État. Cette démarche soulève une question essentielle : comment articuler l’autorité traditionnelle avec les principes de la République sans créer d’interférences institutionnelles ?
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L’un des enjeux majeurs sera la place des rois traditionnels dans la gouvernance locale. Seront-ils simplement des figures culturelles et historiques ou bénéficieront-ils d’un rôle consultatif dans les affaires locales ? Cette question est d’autant plus pertinente que, ces dernières années, plusieurs figures royales ont été sollicitées pour des médiations en période de tensions sociopolitiques.
Une réforme entre valorisation et défis
La reconnaissance des royaumes et de leurs rois pourrait constituer une avancée significative dans la valorisation du patrimoine immatériel béninois. Toutefois, plusieurs défis se posent. D’abord, la question des successions royales, souvent sujettes à des conflits internes, nécessitera un encadrement rigoureux pour éviter des crises locales. Ensuite, l’articulation entre cette reconnaissance et le principe de laïcité de l’État devra être clairement définie pour éviter toute ambiguïté sur le rôle des rois dans les décisions politiques.
Au-delà des considérations juridiques et institutionnelles, cette réforme traduit une volonté politique de réhabiliter l’héritage culturel du pays. En offrant une légitimité officielle aux chefferies traditionnelles, le Bénin pourrait renforcer la cohésion sociale et raviver un sentiment d’appartenance culturelle au sein des populations concernées.
Reste à savoir dans quelle mesure cette loi pourra s’appliquer sans heurts et comment elle sera perçue par l’ensemble des acteurs politiques et traditionnels. L’adoption de ce texte marquera sans doute un tournant dans les relations entre l’État béninois et ses héritages royaux, entre tradition et modernité.
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